Annette Béziat
Nul mieux qu'elle n'en connaît toutes les maisons et les familles qui les ont habitées au cours du vingtième siècle.
«Je vais vous parler de la vie avant l'électricité, vers 1925... J'étais toute petite, mais je m'en souviens bien ! Ma famille est originaire d'Arue des deux côtés, du côté de mon père et du côté de ma grand-mère maternelle qui habitait Le Maysouot avant de se marier à Lencouacq. Ma maison de famille s'appelle « Chanteclair »; c'est papa qui l'a baptisée ainsi, car avant elle se nommait « Le Bénézit », nom qu'on donne dans tous les villages landais aux demeures situées près de l'église. Elle abritait, peut-être depuis 1910, une épicerie et une auberge. Les clients venaient le plus souvent le Dimanche à la sortie de la messe, ou bien quand il leur manquait des petites choses comme des allumettes ou une bouteille d'huile, on les dépannait…
Le Dimanche, on faisait dépôt de pain, c'était le boulanger Bascaules de Roquefort qui nous l'amenait. Comme il y avait un curé à Arue, un à Cachen et un à Lencouacq, il y avait beaucoup de célébrations: le matin, une messe à huit heures pour communier, car il ne fallait pas avoir mangé avant; et après, une messe à onze heures et les vêpres l'après-midi. Et chaque fois, l'église était pleine! Remarquez que pour les personnes âgées, c'était la seule sortie…
Les grands-parents et les enfants de chaque maison étaient à la messe. Dans les familles, ce n'était pas comme à présent, il y avait trois ou quatre générations sous le même toit… Les grands parents, les parents, le jeune couple. Quelquefois, frère et soeur étaient mariés dans la même maison, ils avaient des enfants, cousins qui se considéraient comme frères...
Par exemple à Haurie, Félicien et Jeanne étaient frère et soeur, ils s'étaient mariés, et les deux couples vivaient avec les parents et les grands-parents, plus deux oncles qui étaient handicapés: il fallait les habiller, et quand ils venaient travailler au champ qui se trouvait là haut , à l'emplacement du lotissement de Serres, ils les installaient sur une grande couverture, et ils attendaient…
Ils vivaient tous ensemble en bonne intelligence. Les deux jeunes femmes avaient eu des enfants à peu près en même temps, alors quand elles travaillaient aux champs, par exemple pour faire les foins, l'une d'entre elles se retirait à la maison pour donner le sein, et elle nourrissait les deux bébés; à la tétée suivante, c'était au tour de l'autre jeune maman de rentrer...
Entretemps, les nourrissons étaient gardés par la grand-mère. Il y avait beaucoup plus de monde dans la commune, quand j'allais à l'école, autour des années trente, on était une cinquantaine d'élèves, et il y avait une école au Ginx et une à Guinas…
Ceux de Capberné allaient à l'école à Guinas, ils étaient plus près... Les Soubiron, qui habitaient le Clin , allaient à Roquefort. Le Clin, c'était la maison qui était sous le grand monticule de chaux près de la papeterie. Elle était alors située dans Arue. A l'épicerie, on faisait bureau de tabac. Il y avait toujours quelque petit vieux qui venait acheter son tabac, du papier à cigarette, des mèches d'amadou pour le briquet.
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